La mise en scène
Un dispositif minimaliste met en relation trois « opératrices » : une actrice, une plasticienne et une créatrice sonore. Elles jouent ensemble, en direct et à vue. Elles bricolent quelque chose de simple sans effet spectaculaire ni illusionniste. Quelque chose qui aurait la simplicité, et la bouleversante profondeur, d’un « jeu d’enfant ».
Le jeu pourrait s’appeler Qu’est ce qu’une petite fille ? Il nous appartient d’en inventer les règles.
Le bricolage est donc pleinement assumé. L’actrice, pas plus que les deux autres opératrices, ne fait pas semblant de ne pas faire ce qu’elle est en train de faire.
Le mécanisme se montre comme tel. Il fonctionne un peu comme un dispositif « à la Brecht » même s’il a une visée différente. L’agencement scénique connecte plusieurs machines : un vidéo projecteur, des capteurs et le corps de l’actrice, cette machine vivante.
Le rideau de verre évoque pour nous la page blanche verticale de l’ordinateur qui se remplit de mot, une « scène » de la page. C’est pourquoi l’actrice apparaît derrière un écran où sont projetées les phrases du texte.
Elle donne à entendre le cri de la petite fille enfermée dans une cage de verre, le cri de la fillette multiple que nous sommes toutes, et même que nous sommes tous. Il ne s’agit pas en effet de la petite fille que nous avons été ou celle que nous avons connue, il s’agit d’un devenir petite fille de chacun d’entre nous, un devenir qui nous concerne tous.
À la question deleuzienne que pose Claire Fercak : Qu’est ce qu’une petite fille ?, une réponse tout aussi deleuzienne semble convenir : Une petite fille est une machine désirante.
Le système de bricolage triangulaire qui occupe la scène vise ainsi à faire fonctionner une telle machine désirante.